|  | 
 
 
 
   |  |  | 
 
 
 
 
						Mouvement Républicain Populaire
						 
							Mouvement 
							Républicain
							Populaire
( M.R.P. 1944-1967 ) par Benoît JEANNEAU 
 
						
							
								
									
								 
						Le Mouvement Républicain Populaire est un parti politique français d'inspiration 
						chrétienne sociale apparu en 1944 qui a joué un rôle très important sous la IVè 
						République (1945-1958) en raison non seulement de l'audience dont il a joui au lendemain 
						de la Libération, mais aussi de la vision nouvelle qu'il apportait de la démocratie.
 
 
 
						
							| 1 | 
									Caractéristiques                                                                  
									 Haut de page |  
							|  | 
									C'est le 26 novembre 1944 qu'un Congrès constitutif de 200 personnes représentatives des générations 
									montantes issues de la Résistance et de l'Action Catholique créa le M.R.P. et porta à sa présidence 
									Maurice Schumann, la voix de la France libre à Londres, tandis qu'il élisait comme Délégué général 
									André Colin
									(1)
									 , ancien responsable de l'Association Catholique de la Jeunesse française (ACJF) et confiait 
									le Secrétariat général adjoint à Albert Gortais, un autre résistant et animateur de mouvement de jeunesse.
 
 Ce qui symbolisait bien la volonté de renouvellement des cadres politiques du pays après la parenthèse 
									de la seconde guerre mondiale et de l'occupation.
 En effet, et comme son nom l'indique, le M.R.P. n'est pas un parti comme les autres en ce sens qu'il ne 
									borne pas ses ambitions à la participation au pouvoir, mais veut en même temps associer les forces vives de 
									la société à la construction d'une République nouvelle.
 
 
 |  
							|  | 
									
										| 1.1 | C'est un mouvement |  
										|  | 
												Les fondateurs ont beaucoup insisté sur ce terme pour bien signifier que dans leur esprit il 
												s'agissait essentiellement de rassembler tous ceux qui partageaient les mêmes convictions 
												chrétiennes ou humanistes et étaient disposés à s'impliquer dans une action sociale, culturelle 
												ou politique, à s'engager au service de la Cité.  Et cela sans exclusive, comme l'absence volontaire 
												de référence à la "démocratie chrétienne" en témoigne, pour éviter tout enfermement d'ordre 
												confessionnel.Dès le départ le M.R.P. s'est ainsi défini comme une école de pensée ouverte à toute sensibilité
												solidariste, une association  d'éducation populaire autant qu'un parti politique. En cela il restait 
												bien dans la filiation de Marc Sangnier dont il fit son président d'honneur.
 Et dans son premier élan il allait pleinement réussir à fédérer autour de lui tout un réseau 
												d'organisations sociales et de cercles intellectuels parmi lesquels il faut mentionner non seulement 
												les différents mouvements d'action catholique spécialisés, mais la Centrale syndicale chrétienne (CFTC) 
												dirigée par Georges Tessier, les Semaines sociales animées par Charles Flory, sans oublier l'équipe des 
												rédacteurs et des amis du journal "l'AUBE" de  Francisque Gay.
 
 
 |  
										| 1.2 | Républicain et Populaire |  
										|  | 
												Deux mots également choisis à dessein pour marquer une volonté de transformer non seulement la 
												République, mais aussi la société.
											 
												
													Transformer la République, c'est à dire la rendre plus consensuelle en dépassant les 
													affrontements du passé et en particulier la coupure du pays en deux camps et le 
													sectarisme qu'elle entretenait,
												
													Changer la société, c'est à dire la rendre plus juste en  s'efforçant d'améliorer la 
													condition des masses populaires.
												 
												C'est dans ce double message en faveur d'une plus grande tolérance politique et d'une véritable 
												démocratie économique et sociale que réside toute l'originalité du M.R.P. par rapport aux anciens 
												partis conservateurs ou modérés de la IIIème République.
 
 
 |  |  
							| 2 | 
									Organisation                                                                        
									 Haut de page |  
							|  | 
									Le M.R.P. s'est donné une structure, démocratique et suffisamment démultipliée, pour 
									permettre d'associer élus et adhérents aux décisions prises à différents niveaux :
 
 
 |  
							|  | 
									
										| - | 
												Et d'abord au plan territorial où chaque fédération départementale regroupe 
												les sections locales et les équipes spécialisées (féminines, jeunes, ouvrières, rurales...) destinées à faire pénétrer l'esprit du mouvement dans tous les 
												milieux de vie.C'est là que s'opère le travail militant : information et éducation des adhérents, 
												recherche de nouveaux sympathisants, investitures aux élections locales.
 
 
 |  
										| - | 
												A l'échelle nationale les rôles sont distribués entre trois instances plus ou moins 
												larges :
											 
												
													Le Congrès qui se réunit une fois par an pour fixer les grandes orientations 
													du parti et élire le Président et le Secrétaire général.
												
													Le Comité National (200 membres) convoqué tous les deux mois pour débattre de 
													l'activité du mouvement dans l'intervalle des congrès.
												
													Enfin la Commission exécutive (50 membres) et son Bureau (13 membres) qui dirigent 
													en continu le parti, accordant les investitures aux élections législatives et se 
													prononçant sur la participation au gouvernement.
												 
												Dans toutes ces formations, à l'exception du Bureau où dominent parlementaires et ministres, 
												les militants sont représentés par des délégués en nombre suffisant pour maintenir un vrai 
												dialogue entre la base et les dirigeants.
												
 
 |  
										| - | 
												Quant aux présidents et aux Secrétaires généraux, ils doivent leur élection, acquise le plus 
												souvent à l'unanimité, à leur réputation et leur ascendant personnel, comme en témoigne cette 
												liste de leaders incontestés qui se sont succédé à la tête du M.R.P. :
 
 |  
										|  | 
												
													| Présidents | Secrétaires généraux |  
													| Maurice SCHUMANN 1944-1949 Georges BIDAULT 1949-1952
 Pierre-Henri TEITGEN 1952-1956
 Pierre PFLIMLIN 1956-1959
 André COLIN 1959-1963
 Jean LECANUET 1963-1965
 | André COLIN 1944-1955 Maurice-René SIMONNET 1955-1963
 Joseph FONTANET 1963-1967
 |  |  |  
							|  | 
									Ainsi le M.R.P. se différenciait-il de ces partis de notables ou de cadres qui avaient tenu 
									la droite sous la IIIème République par sa culture militante. 
									Mais il n'était pas devenu le parti de masse qu'il aurait voulu, faute d'avoir pu attirer, même 
									dans sa période faste, un nombre assez important d'adhérents (125 000 en 1945 pour 355 000 à la 
									S.F.I.0. et 900.000 au Parti Communiste).
 
 
 
 |  
							| 3 | 
									Itinéraire électoral et politique                                         
									 Haut de page |  
							|  | 
									II se résume en deux temps : un essor spectaculaire au lendemain de la Libération mais 
									suivi, quelques années après, d'une retombée tout aussi considérable. Alors que dans beaucoup 
									d'autres pays européens ce même courant de pensée allait pouvoir s'épanouir et s'insérer 
									durablement dans le paysage politique.
 
									
										| 3.1 | 
												 La phase montante (1945-1951)
											 |  
										|  | 
												
													elle s'ouvre avec les élections à la première assemblée  constituante 
													du 21 octobre 1945 qui place d'emblée le M.R.P. nouvellement créé en 
													deuxième position juste derrière le parti communiste avec 4.580.000 voix 
													(23%) et 151 sièges sur 586.
													elle atteint son point culminant lors des élections à la seconde assemblée 
													constituante du 2 juin 1946 à la faveur desquelles le M.R.P. devient le 
													premier parti de France avec 5.581.213 voix (28,2%) et 169 sièges.
													et elle se poursuit aux élections à la première assemblée nationale du 10 
													novembre 1946 qui marquent un certain tassement en voix (26%), mais sans 
													baisse de l'effectif parlementaire, à un siège près (168).
												 
												Plusieurs facteurs peuvent expliquer ce succès :
											 
												une approche nouvelle de la politique,la force ascensionnelle d'une équipe dirigeante jeune et issue de la Résistance, l'arrivée d'un électorat féminin sensible aux questions sociales.  
												Mais il faut tenir compte aussi de certaines circonstances spécifiquement 
												françaises :
											 
												l'effondrement de la droite traditionnelle plus ou moins compromise avec le régime de Vichy,la nécessité de faire barrage au parti communiste, le soutien implicite au départ du général de Gaulle. 
												Quoi qu'il en soit, le M.R.P. allait de ce fait disposer pendant six ans des 
												moyens d'agir au sein des deux majorités gouvernementales auxquelles il a successivement 
												participé : celle du tripartisme, incluant socialistes et communistes, et après 
												l'exclusion de ces derniers en mai 1947 par le président du Conseil socialiste Paul 
												RAMADIER, celle dite de la Troisième force où il se trouvait associé sur un pied d'égalité 
												avec les socialistes, les modérés et radicaux pour la défense du régime.
 
 |  
										| 3.2 | Le reflux (1951-1962) |  
										|  | 
												La chute s'est faite par paliers, mais c'est le premier qui a été le plus rude, même s'il 
												n'était pas irrémédiable.
											 
												
													Lors des élections du 17 juin 1951 le MRP a perdu, en effet, d'un coup la moitié de ses 
													électeurs (12.3% des suffrages exprimés) et de ses députés (86 au lieu de 168). Une hémorragie 
													due à l'apparition et à la montée en puissance du Rassemblement du Peuple Français (RPF) 
													lancé par le général de Gaulle et qui lui a manifestement ravi une bonne partie de sa clientèle 
													qu'il ne récupèrera jamais.
												
													L'érosion allait même se poursuivre aux élections du 2 janvier 1956 (11% des suffrages et 74 
													députés) et à celles de novembre 1958 (10% s. exp. et 54 députés sur 552 sièges).
												
													Un redressement s'annonçait pourtant à la faveur du ralliement du MRP à la Vème
													 République sous l'égide du Président Pierre Pflimlin quand la rupture avec le général 
													de Gaulle en 1962 à propos non seulement de l'avenir de l'Europe, mais du référendum constitutionnel, 
													rejeta le parti dans l'opposition et lui valut, après l'échec du Cartel des NON, une défaite 
													cuisante aux élections de novembre dont il ne se relèvera pas (8% s.expr. et 40 députés au  lieu 
													de 57 sur 482).
												 
												C'est donc bien le général de Gaulle qui, en raison de son "aura" exceptionnelle et  avec ses allers 
												et retours intempestifs sur la scène politique, a, volens nolens, compromis l'expérience de la démocratie 
												chrétienne en France.
 
 
 |  |  
							| 4 | Action gouvernementale  Haut de page |  
							|  | 
									Le M.R.P.a participé à presque tous les gouvernements qui se sont succédé de 1945 à 1958 (22 sur 26) et il en 
									a présidé cinq (G. Bidault : 2, R. Schuman : 2, P. Pflimlin : 1).
									Il a même été associé à plusieurs gouvernements dans les débuts de la Vème République.
 
 Il a donc été aux affaires pendant plus de quinze ans, ce qui lui a permis d'influencer le cours des choses dans 
									plusieurs domaines qui lui tenaient à cœur :
 
									la politique étrangère et la construction de l'Europe,l'action sociale et la politique familiale, la modernisation de l'économie et de l'agriculture. 
									Car derrière une instabilité gouvernementale qui faisait assurément désordre, la
									IVème République a su préserver une certaine continuité ministérielle en 
									maintenant à la tête des grandes administrations des responsables animés du même esprit.
 Le M.R.P. a pu ainsi marquer son empreinte de façon durable dans plusieurs secteurs d'activité où on lui a assez 
									vite reconnu une vocation :
 
									
										et d'abord aux Affaires étrangères dirigées pendant dix ans (1944-1954) par Georges Bidault et Robert Schuman 
										auxquels on doit l'adhésion au Pacte Atlantique (1948) la réconciliation franco allemande et le lancement de 
										la construction européenne avec la création du Conseil de l'Europe à Strasbourg (mai 1949) puis de la Communauté 
										Européenne du Charbon et de l'Acier (CECA) (Déclaration de R. Schuman du 9 mai 1950)
									
										ensuite au Ministère du Travail et de la Sécurité sociale qu'anima presque continûment de 1950 à 1962, c'est à 
										dire jusque sous la Vème République, Paul Bacon, ancien syndicaliste très lié aux équipes ouvrières du parti.
									
										mais il faut rappeler aussi tout le travail accompli à la Santé Publique et à la Population par les ministres 
										démocrates chrétiens qui s'y sont relayés de Robert Prigent à Joseph Fontanet en passant par Germaine Poinsot-Chapuis 
										et André Monteil.
									
										enfin du côté de la production et de l'économie on ne saurait oublier l'impulsion donnée par Jean-Marie Louvel 
										à l'Industrie et au Commerce (1950-1954), ni le rôle très important joué par Pierre Pflimlin d'abord au Ministère 
										de l'Agriculture où pendant quatre ans (1947-1951) il s'employa avec le concours des organisations 
										professionnelles à moderniser nos structures agricoles et à préparer l'organisation européenne des marchés 
										agricoles, puis au Ministère des Finances (1955-1956) où il lança un vaste programme d'investissements pluriannuels 
										et créa les 21 circonscriptions d'action régionale qui sont devenues nos régions actuelles.
									 
									Autant de réalisations qui montrent que le MRP n'a pas été que le parti de l'Europe et le parti de la famille, 
									défenseur de la liberté de l'enseignement, mais qu'il a contribué aussi à doter le pays de nouvelles structures 
									comme les grandes entreprises publiques, la Sécurité sociale, les Comités d'entreprises et le plan de modernisation 
									et d'équipement qui correspondaient à l'idée qu'il se faisait de la démocratie économique et sociale.
 
 
 |  
							| 5 | Bilan  Haut de page |  
							|  | 
									Et cependant il n'a pas laissé dans l'opinion une image très positive, comme si on lui avait fait porter la 
									responsabilité de toutes les faiblesses et erreurs de la IVème République.
 
 Et il reste vrai qu'il n'est pas parvenu à faire corriger à temps, malgré les efforts de Robert Lecourt et de 
									Pierre Pflimlin, les dérives du régime d'assemblée et qu'il n'a pas su ou pu ouvrir la voie à une décolonisation 
									maîtrisée, pourtant inscrite dans la conscience internationale.
 
 Mais en dehors de ces erreurs, qu'il n'avait pas été le seul à commettre, le MRP est dans l'ensemble demeuré fidèle 
									à ses principes. C'est même le reproche inverse qu'on aurait pu lui faire, celui de n'avoir pas accepté de transiger 
									avec ses convictions européennes et son attachement au régime parlementaire pour réserver l'avenir.
 
 Car il est bien clair qu'en 1962 il a préféré s'éloigner du pouvoir plutôt que de perdre sa raison d'être.
 
 
 
 |  
							| 6 | Disparition et Survivance  Haut de page |  
							|  | 
									Mais après ce choix courageux, sinon très réaliste, et le désaveu de l'opinion qui s'ensuivit aux élections de 
									novembre, le MRP n'avait plus d'autre issue que de tenter de construire un pôle de résistance qui puisse devenir 
									une alternative dans l'après gaullisme.
 D'où la décision prise dès ce moment là par ses dirigeants de se fondre dans un ensemble plus vaste avec des 
									éléments provenant des milieux indépendants paysans et radicaux. Ce qui devait aboutir en 1966, après la Convention 
									de Lyon, à la création du Centre Démocrate présidé par Jean Lecanuet dont le succès au premier tour de l'élection 
									présidentielle de 1965 avait accru l'audience.
 
 En mettant fin officieusement à l'existence du MRP en 1967, ses derniers leaders n'avaient donc pas perdu confiance 
									dans l'influence de la démocratie chrétienne sur la vie politique française.
 Ils estimaient seulement que, notre système étant redevenu majoritaire, elle devait s'exercer autrement, c'est à 
									dire dans le cadre d'un centrisme élargi ou d'une coalition majoritaire qui lui laisserait la liberté d'exprimer 
									sa différence.
 |  
						Cette famille d'esprit a effectivement survécu et ses plus fidèles militants se sont regroupés d'instinct au "Centre des 
						Démocrates Sociaux" (1976) et plus tard à "Force Démocrate" (1995) puis à la "Nouvelle UDF" (2002). Et tout l'effort qu'a déployé 
						François Bayrou consiste précisément à lui conserver son identité à l'égard du mouvement d'unification de 
						la droite.
 
 
 
						Benoît Jeanneau
					 
						Professeur émérite à l'université de Droit de Paris II
 Bibliographie sommaire : 
						André Diligent "La charrue et l'Etoile" - Ed. COPRUR 2000Pierre Letamendia "Le Mouvement Républicain Populaire" - Ed. Beauchesne 1995 - Préface de François BayrouJean-Marie Mayeur "Des partis catholiques à la démocratie-chrétienne XIXè et XXè siècles" - Ed. Armand Colin (2è tr. 1980)Robert Bichet "La démocratie chrétienne en France" "Le Mouvement Républicain Populaire" (Ed. Jacques et Demontrond - Besançon (3è tr. 1980)Emile-François Callot "Le Mouvement Républicain Populaire" - Ed. Marcel Rivière 1978Maurice Vaussard "Histoire de la Démocratie Chrétienne" Tome I (France, Belgique, Italie) - Ed. du Seuil 1956   
						Notes :_________________________
 (1)
						 qui sera peu après secrétaire général à la place de Robert Bichet devenu Ministre
 
 
 |  |  |